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Décrié par son ancien délégué général, l'indice FNAIM est-il digne de confiance ? 

L'indice publié mensuellement par la FNAIM est repris unanimement par la presse, qui le considère comme un indicateur avancé des prix de l'immobilier. Les statistiques incontestables, celles des notaires, ne sont disponibles avec plusieurs mois de retard sur les transactions effectuées dans les annonces immobilières, ce qui fait de l'estimation FNAIM l'indice le plus réactif... Toutefois, ce dernier avait déjà, dans le passé, présenté des variations surprenantes par leur violence, qui n'avaient pas manqué de laisser perplexe, et que nous avions critiqué ici-même. On se souvient du -5% mensuel de la fin de l'année dernière, et du +3% du mois d'avril. Des variations d'une telle force que tout l'indice en devenait suspect.

La semaine dernière, M. Buzy-Cazaux, délégué général de la FNAIM, a quitté ses fonctions, la presse rapportant des divergences, notamment sur la fiabilité de l'indice. A cette occasion, M. Buzy-Cazaux fait état d'un échantillon de 4000 () ventes. Que sait-on sur son mode de calcul, et sur sa représentativité ?

L'indice est-il assez prédictif ?

Apparemment, non. L'indice calculé par l'INSEE à partir des données relevées par les notaires est beaucoup plus exhaustif : par la taille de son échantillon, et grâce aux ajustements faits en fonction de la qualité du bien (présence ou non de terrasse, l'étage, des éléments de conforts...), l'indice tente de représenter le plus fidèlement possible l'état du marché. Si, d'un mois sur l'autre, seuls des biens exceptionnels se vendent, cette bizarrerie est prise en compte et son effet sur les prix est « gommé ». En revanche, l'indice est très long à être publié... L'indice de la FNAIM est plus réactif, environ 10 jours après la fin du mois considéré. Mais à quel prix ? Si l'indice FNAIM était représentatif, il devrait refléter les mêmes évolutions que l'indice des notaires.

Or, les courbes ne se superposent pas : voici ce que donnent l'évolution annuelle moyenne des indices, une fois tenu compte du trimestre de décalage (ce qui, d'ailleurs, ne change guère les disparités entre les indices. :


Alors que les courbes sont censées se superposer, on constate que les différences sont parfois très importantes : en 2005, la FNAIM a vu 10,9% de hausse quand les notaires ont vu 15,1%. Ces écarts donnent une idée de la marge d'erreur de l'indice FNAIM, car ils sont bien supérieurs à la précision souhaitée par l'indice, qui annonce des variations mensuelles de l'ordre du dixième de pourcent ! Cumulé, l'indice FNAIM, tous logements confondus, entre début 2001 et le pic des prix, d'une hausse de 86%, alors que l'INSEE/Notaires voit 107%. Cela peut sembler du pinaillage, mais sur une maison à cel� fait 21 000 € d'écart d'estimation pour un bien évalué à 100 k€ il y a 8 ans...

Si l'indice FNAIM semble représenter les grandes tendances observées par les notaires, sa précision laisse à désirer.

L'indice est-il représentatif ?

L'indice est constitué, nous annonce-t-on, par l'étude de 10 000 à 12 000 transactions chaque mois. Le nombre de logements en France est estimé à 32,5 millions. Il va de soi que la FNAIM ne peut analyser que les logements qui ont fait l'objet d'une vente, et dont il est ainsi possible de connaître le prix. Malheureusement, rien ne permet de penser que l'ensemble des logements qui se vendent est représentatif de l'ensemble des logements. Sans entrer dans le détail des chiffres, ces derniers ne font que confirmer l'intuition : les studios prisés des étudiants, et vite revendus, constituent une part importantes des transactions, beaucoup plus que les maisons et appartements familiaux que l'on espère conserver toute une vie. La FNAIM est donc obligée de construire un échantillon, à partir des ventes qu'elle peut observer, pour qu'il soit représentatif de l'ensemble des logements. Car on sait bien qu'un studio, de petite surface, présente souvent un prix au m² supérieur : si l'indice n'en tenait pas compte, il ne serait pas très utile...

Que dit la FNAIM ?

Dans son document «  » de 2004, la FNAIM déclare que sa méthode de construction de l'indice permet d'annuler les distorsions causées par le problème ci-dessus (appelé « effet de structure »). Elle construit en effet un ensemble d'échantillons locaux, et calcule un indice pondéré en fonction de la part relative de chacun de ces segments de marché (géographique et par type de logement). Ainsi, si le marché francilien reste dynamique, alors que l'activité baisse en province, la part de l'Ile-de-France, plus chère que la moyenne, ne fera pas remonter l'indice.

Qu'en est-il de la qualité des logements ?

On le sait tous, le prix d'un bien varie énormément en fonction de sa situation, de son aménagement, d'un ravalement récent... Or, pour construire un échantillon représentatif, il faudrait qu'il contienne, mois après mois, toujours autant de maisons à rénover que de maisons flambant neuves. La classification des biens suivant ces critères a d'ailleurs constitué un travail très important de l'INSEE dans la fabrication de son indice immobilier. Pour la FNAIM, toujours selon le même document, la situation était plus simple : comme le parc de logement évolue peu, en prenant un nombre suffisant de logements au hasard, on aura toujours la même proportion de logements de qualité. La distorsion sera ainsi noyée dans la masse...

Que doit-on en penser ?

C'était peut-être vrai quand l'indice comptait 10 à 12 000 transactions au niveau national. Prises aléatoirement, la taille de l'échantillon pouvait être suffisante. En revanche, la FNAIM communique, encore en avril 2009, des prix moyens constatés par région, voire dans les principales grandes villes. A l'échelle d'un département, ou d'une ville moyenne, la taille de l'échantillon local risque d'être insuffisante, et les effets de qualité risquent d'être beaucoup plus sensible. Prenons un département moyen, qui compterait 1/100e des transactions analysées par la FNAIM : une fois répartie entre maisons et appartements, puis en fonction du nombre de pièces, il ne reste qu'une dizaine d'appartements de 3 pièces, par exemple, pour déterminer le prix de l'ensemble des 3 pièces. Et là, le bât blesse, car on sait bien qu'au sein d'une ville, les prix peuvent varier aisément de 50% entre l'hypercentre et les zones franches urbaines... D'un mois sur l'autre, un secteur peut se montrer plus dynamique qu'un autre, et causer des modification très importantes du prix constaté au m²...

Avec les révélations de M. Buzy-Cazaux, on se rend compte que l'échantillon national de 4000 transactions est parfaitement insuffisant pour gommer l'effet de qualité. Suivant le document de méthode ci-dessus, la région Alsace représente 144 transactions pour 10 000. Cela voudrait dire que dans le cas d'un échantillon de 4 000 transactions, 57 transactions ont été retenues pour calculer le prix moyen du m² dans cette région... Difficile de dire que le nombre massif de transactions suffit à gommer l'effet de qualité, quand on voit qu'une maison peut s'y vendre entre 800 et 5000 euros du m², suivant qu'elle est à la campagne ou dans le quartier des institutions européennes de Strasbourg !

Si, des années durant, la FNAIM a construit un échantillon sur un nombre important de transactions, c'est qu'elle avait besoin d'un vaste choix de logements à analyser pour gommer ces effets. Avec le ralentissement des transactions, il semble que la collecte des données ne soit plus possible. Comme on peut s'y attendre, et comme le confirment volontiers agents immobiliers et notaires, les biens sans défaut se vendent toujours, tandis que les « coucou » s'échangent beaucoup moins vite. Du coup, dans un petit échantillon, on peut penser que la part des biens de qualité a augmenté, provoquant le bond phénoménal de 3% du prix au m² calculé en avril.

M. Buzy-Cazaux, en tout cas, semble le penser, contredisant en cela M. Pallincourt, qui affirmait dans que la « base statistique n'est pas influencée par le nombre de transactions enregistré sur le marché. Nous travaillons à nombre de transactions constant, avec un panier de biens qui n'évolue pas d'un mois à l'autre (il contient par exemple toujours le même nombre de 1 pièce, de2 pièces, etc.) » Sur la composition, personne n'en doute, mais sur le gommage de l'effet de qualité, qui crée d'énormes marges d'erreurs sur les chiffres publiés, la question reste entière...

Les chiffres de la FNAIM minorent les prix par rapport aux notaires depuis 2005

Il serait intéressant de découvrir pourquoi la hausse vue par la FNAIM est, depuis 2005, systématiquement inférieure à celle constatée par les notaires. En l'absence de totale transparence méthodologique sur l'indice FNAIM, nous en sommes réduits aux hypothèses. Si l'on reste sur un problème d'effet de qualité, cela voudrait dire que le nombre de biens « pourris » a augmenté depuis cette période... Et ce n'est pas totalement à exclure : dans les années d'euphorie du marché, le nombre de granges à rénover et autres combles à refaire entièrement a explosé à la vente. A Paris, faute de moyens, certains ont acheté des chambres de bonnes, comptabilisées avec les studios... Nombre de particuliers se sont lancés dans les travaux pour jouer au promoteur ou au marchand de bien... Le retour sur le marché d'un ensemble de biens, qui en étaient sortis pour cause de vétusté, notamment dans la campagne lointaine, a pu jouer en ce sens... Cela tendrait à accréditer l'idée que l'effet qualité était déjà, sur un échantillon plus grand, fort mal pris en compte.

La hausse de la FNAIM est-elle erronée, ou peut-on envisager une erreur des notaires ?

La question mérite d'être posée. Toutefois, longtemps après les transactions, on dispose d'un moyen de contrôle des prix du marché : chaque vente faisant l'objet d'une taxe, les impôts enregistrent le montant total des transactions. Comme on connaît le nombre de transactions, on peut suivre l'évolution des prix moyens... Et M. Chatel, alors secrétaire d'Etat, sur le manque de transparence du marché de l'immobilier, déclarait : « Les deux sources conduisent à une appréciation divergente de l'ampleur de la hausse des prix constatée, surtout depuis 2005. À l'analyse, les chiffres de la FNAIM semblent peu compatibles avec l'évolution de l'assiette des droits de mutation suivie par la direction générale des impôts. De plus, la saisonnalité des indices FNAIM n'est pas compatible avec les observations réalisées par ailleurs dans les travaux académiques portant sur la question. ». Un commentaire lapidaire, auquel nous souscrivons, qui résume bien que si défaut il y a dans les indices, c'est bien du côté de la FNAIM qu'il faut le rechercher.

Validité et diffusion de l'indice

Le monde politique est au courant du problème de manque de transparence de l'indice de la FNAIM depuis des années, comme en témoigne le compte-rendu de la séance du Sénat ci-dessus, ou le qui l'a suivi. Le monde universitaire également, si l'on s'en tient à ce que M. Renard, directeur de recherche à Polytechnique,  : « L'indice de la Fnaim ne vaut pas cher puisqu'une grande partie des agents immobiliers en France ne font pas partie de son réseau, celui de l'Insee est la meilleure approximation à l'heure actuelle ». Evidemment, en publiant son indice, la statistique publique ne pouvait manquer de constater que celui de la FNAIM était largement divergent... Ce qui n'empêche pas la presse de reprendre sans les remettre en question, mois après mois, les chiffres de la FNAIM. Peut-être le départ de M. Buzy-Cazaux, très lié à la question de l'indice, fera prendre conscience aux journalistes qu'ils donnent un écho médiatique considérable et indû à ce qui ne reste qu'un indice très approximatif, contesté tant en interne que par les observateurs extérieurs éminemment respectables ? Car si écrit à cette occasion : « Sur fond de crise immobilière, le départ de Henry Buzy-Cazaux démontre que le malaise persiste sur la valeur des indicateurs du marché. Il aura peut-être le mérite de bousculer les habitudes et d'apporter de salutaires changements. Cela fait des années que les données de la Fnaim sont contestées. », il ne me semble pas que ce journal se soit fait l'écho de cette contestation durable dans ses lignes jusque là... Les salutaires changements sont autant à apporter au niveau de la critique de cette source dans les rédactions que dans la méthodologie de la FNAIM...

Que peut-on faire ?

Les statistiques immobilières passionnent les Français, car elles touchent à la valeur du logement, qui est soit, pour beaucoup, l'essentiel de leur patrimoine, ou, pour les acheteurs, l'achat le plus important qu'ils feront dans leur vie. Alors que le prix d'un pot de yaourt fait l'objet d'une surveillance rigoureuse, tant des pouvoirs publics que des consommateurs, force est de constater que le prix de l'immobilier reste, lui, particulièrement opaque.

Les chiffres disponibles sont publiés par un lobby professionnel, la statistique publique ne fournit que des indices nationaux qui ne permettent pas de connaître les prix d'un marché spécifique, laissant l'acquéreur dans le flou le plus complet... Les prix réels de transactions de biens similaires sont souvent difficiles à connaître : quand bien même on connaîtrait un logement présentant des caractéristiques proches du sien, on ne peut souvent pas connaître autre chose que les prix d'annonce, et non pas le prix de transaction. L'information est toutefois publique, même si c'est peu connu. La conservation des hypothèques est tenue de délivrer les actes qu'elle conserve sous dix jours à tout ceux qui le requièrent. Néanmoins, le coût de 12 euros empêche la constitution d'une grande base exhaustive de transactions.

Ce coût est lié à la responsabilité du conservateur, qui s'engage personnellement sur l'exactitude des documents fournis. Un tel niveau de confiance n'est pas forcément nécessaire pour la simple détermination d'un prix immobilier, qui n'est qu'une estimation sur la base de transactions comparables. La publication à titre informatif de ces données, qui est réalisée sans grande difficulté dans d'autres pays, permettrait certainement une meilleure détermination du prix des biens immobiliers. Peut-être que des prises de contact avec les associations de consommateurs concernant ce point précis, ainsi qu'avec les députés à travers elles, pourrait permettre de faire évoluer les choses. Seule la publication de ces informations permettra également l'émergence de statistiques indépendantes, semblables à l'indice Case/Schiller aux Etats-Unis, et publiés par une association impartiale suivant une méthodologie moins obscure...






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