T'as pas cent balles ? : l'impact des conditions de crédit sur les primo-accédants.
 
Accueil Cotations ABC Immobilier Statistiques et projections Contact
 
Annonces
T'as pas cent balles ? : l'impact des conditions de crédit sur les primo-accédants. 

Les montants moyens d'apport donnent une fausse image du marché immobilier.

Lire les profils des acheteurs dans l'immobilier donne souvent une image assez fausse, et idyllique, de l'acquisition. Souvent, un seul chiffre est repris, pour justifier les prix élevés que nous connaissons : le montant moyen de l'apport (un peu moins de 150 000 euros) et le montant moyen des prêts (équivalent). Dans ces conditions, l'acquisition d'une demeure à deux millions de francs semble à la portée de toute les bourses, les mensualités ne représentant que quelques centaines d'euros, une somme dont peut s'acquitter la plupart des ménages.

Ce qui n'est que plus rarement mentionné, c'est l'extrême disparité entre les cas, une disparité suffisante pour rendre la moyenne très peu significative. Pensez-vous qu'avoir les pieds gelés et la tête en nage est une situation confortable ? Apparemment, c'est le cas de ceux qui ne mentionnent que les moyennes dans ce domaine. Intéressons-nous plutôt aux extrêmes, et notamment à la frange la moins favorisée, celle qui ne revend pas de bien avant d'acheter. Celle qui est à la base du grand jeu de domino de la spéculation immobilière que nous voyons avoir un hoquet actuellement...


L'essentiel des achats sont le fait de primo-accédant.

On pourrait croire, à force de lire que la France compte 58% de propriétaires, que cette population est assez statique et qu'elle pratique une sorte de Monopoly grandeur nature, à s'échanger des biens. S'il est vrai que le taux de propriétaires augmente lentement, il ne faut pas perdre de vue que le nombre, lui, augmente continuellement. En 2007, on a compté environ 800 000 transactions dans l'ancien et environ 130 000 dans le neuf. Pourtant, le taux de propriétaires est resté quasiment stable. On pourrait croire que tous ces logements ont été revendus entre propriétaires, et que le nombre de nouveaux entrants est faible. Ce n'est pas le cas : l'apparente stabilité du taux, qui n'a gagné que 2% en 5 ans, cache ainsi un très fort dynamisme de la primo-accession, qui représente la majorité des acquisitions.



Plusieurs raisons expliquent la stabilité du taux de propriétaires. La première, c'est l'augmentation continuelle du nombre de ménages, estimée à 230 000 l'an dernier. Pour que le taux de propriétaires restât simplement constant, il fallait que 145 000 ménages achetassent leur premier logement. Et c'est près des deux tiers des logements qui ont été acquis par des « primos » ! Soit un total de 585 000 transactions. L'expansion démographique ne suffit pas à expliquer la quasi-stabilité du taux de propriétaires. Le reste des acqusition est compensée par un nombre important de ménages qui quittent le statut de propriétaire : des gens qui vendent pour partir en location, ou des ménages qui disparaissent (fusion suite à un mariage, ou disparition suite à un décès). Au final, le gain net de ménages propriétaires se limite à 200 000 environ, ce qui masque l'importance des « primos » dans le marché immobilier.



Ces « primos » n'ont souvent qu'une épargne minimale et recourent beaucoup au crédit.

Regardons maintenant les caractéristiques des ménages « primos ». Leur apport moyen tombe à un peu moins de 30 000 euros. C'est là qu'on voit que l'apport d'une minorité de revendeurs fait exploser la moyenne générale... Et ce sont ces gens qui doivent soutenir le marché ! Forcément, aux prix actuels, ils se concentrent sur des biens abordables (petits et mal situés) et sont néanmoins au taquet de l'endettement possible. D'après l'observatoire CSA-Crédit Logement, le taux moyen des crédits consentis est de 4,98% en juillet 2008, pour une durée moyenne de 20 ans dans l'accession. Dans ces conditions, combien peuvent emprunter les primo-accédant ? Un couple disposant de revenus médians, et de l'apport moyen, dispose désormais d'un budget de 180 000 euros, et une personne seule de 105 000 euros à 33% d'endettement. Il y a de cela deux ans, ils disposaient d'un apport similaire, mais grâce à des conditions d'emprunt plus favorables, leur budget était de 200 000 et 125 000 euros. Hausse des taux, raccourcissement des crédits : le montant empruntable a baissé de 10% à 15%.


La hausse des taux entraîne l'éviction des primos du marché, pas simplement une hausse de leur mensualité !

Le taux d'effort des « primos » étant déjà supérieur à la moyenne, il n'est plus possible de l'augmenter pour relever les mensualités et conserver une capacité d'emprunt identique. Bien au contraire, la tendance est plutôt à la rigueur dans les conditions d'octroi du crédit, et la qualité des dossiers. Une baisse d'1% du taux d'endettement maximal imposé par les banques (rabaissé de 35% à 33%, voire à 30% maintenant pour les dossiers plus faibles) correspond à une baisse du montant empruntable de 3 000 euros pour une personne seule, 5 700 euros pour un couple). Les banques se montrant maintenant très strictes sur le ratio d'endettement, à tort ou à raison, on voit que rien ne vient prendre le relais pour soutenir la capacité d'emprunt, donc les prix. Il y a fort à parier que la baisse des montants est supérieure aux chiffres présentés ici.


Le ralentissement du marché est naturel : les moins solvables abandonnent leurs projets

Les « primos » ne sont pas masochistes : ils ne vont même plus tenter de demander à leur banque des crédits qu'ils savent qu'on leur refusera (et s'éviter ainsi un sentiment humiliant). Les banques soulignent ainsi que la baisse de la production de crédit en France n'est pas tellement liée au nombre de refus (bien que leur taux ait grandement augmenté, sans que l'on ne dispose encore de chiffres, chaque banque communiquant séparément), qu'à l'autocensure des acheteurs. Forcément, confrontés à des prix qui ne semblent pas baisser significativement, aux prix d'annonces qui sont donc relevés sur ce site, à quoi bon même tenter de faire une proposition, si c'est pour voir son dossier rejeté ? La chute des transactions semble difficile à enrayer car les acheteurs potentiels ne voient que des annonces qui ont quitté leur horizon budgétaire. Il y a donc naturellement un effet domino : en bloquant les ventes de bien intéressant les nouveaux entrants, le ralentissement du crédit affecte la capacité d'achat des gens qui vendent pour racheter... On comprend mieux la hâte soudaine de la FNAIM, syndicat d'agences immobilières, à communiquer sur la nécessité d'une baisse brutale des prix en cas de maintien, quasi-certain, des turbulences du crédit d'ici la fin de l'année. Communication qui semble bien nécessaire, selon un article du Figaro du 24/09/2008, 78% des vendeurs se déclarent inflexibles sur les prix.


Le plus grand risque : la demande d'apport personnel conséquent par les banques.

D'après l'ANIL, la part des acquisitions réalisées sans apport correspond à 25% en 2005, deux fois plus qu'en 2000. Si les banques, soumises à des contraintes fortes sur les risques qu'elles prennent dans l'immobilier, décident ne serait-ce que d'abandonner ce segment, c'est tout d'un court un quart des acheteurs qui se retrouvera de fait exclus. De même, une exigence de 10% d'appport en plus des frais de notaires, signifie que notre couple d'emprunteur disposant d'un apport personnel moyen ne pourra pas emprunter plus de 175 000 euros, quand bien même il aurait des revenus important plus permettant d'emprunter plus en remboursant plus. Et une telle exigence n'est pas délirante, elle correspond simplement à la situation du début des années 2000... Les « primos aisés » seront confrontés aux mêmes contraintes et aux mêmes plafond que les autres... Un soutien de plus qui s'effondre pour le marché.


Part des montant d'apport (Source : crédit logement)

Restent les ventes contraintes !

Nombre de propriétaires sont contraints à la vente par des « accidents de la vie », comme la séparation, une mutation professionnelle, un décès, etc. Ces biens doivent impérativement trouver preneurs, car les propriétaires ne pourront pas toujours supporter le poids de leur loyer et de la mensualité de leur ancien logement, même s'ils le mettent en location : le critère d'endettement s'y opposerait. Il y a un nombre minimum de biens à vendre chaque année, et ce sont ces biens qui verront leur prix baisser en premier, pour se rapprocher des capacités d'emprunts dans la nouvelle donne du crédit. Les statistiques du ministère de l'Equipement, un peu anciennes mais toujours d'actualité, montrent que près de 20% des logements achetés sont revendus avant 3 ans : c'est une durée insuffisante pour justifier l'achat, et il s'agit très certainement d'un revente contrainte (ou spéculative). Le blocage peut durer longtemps, si les vendeurs refusent de baisser leurs prétentions pour tenir compte de la demande, qui se raréfie pour les biens aux prix d'hier : gageons toutefois qu'un ajustement sera nécessaire compte tenu de la contrainte à la vente. Alors qu'il n'existe pas de contrainte à l'achat, la location étant largement possible...


Qu'en déduire pour l'avenir ? Les mentalités ne semblent pas prêtes pour accepter une baisse des prix, et la notion même que les conditions de crédit ne sont plus les mêmes tarde à pénétrer les vendeurs. Tant que ce n'est pas le cas, le blocage va continuer. Comparaison n'est pas raison, mais l'on se souviendra qu'une baisse de 25% de l'activité s'était constatée en 1991, à la veille du krach des prix, spectaculaire dès l'année suivante à Paris.







APPARTEMENT - MAISON - VENTE - LOCATION
- Tous les prix du marché immobilier français
- Consulter nos graphiques (deux ans d'historique)
- Des données mises à jour plusieurs fois par mois

 
Annonces